« Notre système de protection sociale doit se repenser pour être résilient et pour affronter les défis du changement climatique ». C’est ce qu’a indiqué le 6 avril 2022 Mélanie Vogel, rapporteure d’une mission d’information du Sénat. Le rapport des sénateurs s’intitule « Protéger et accompagner les individus en construisant la Sécurité sociale écologique du XXIème siècle ». Au total, il formule 48 propositions visant à atteindre cet objectif.

Sixième branche : pas de consensus

La création d’une sixième branche de la Sécurité sociale a alimenté les débats. Pour autant, les sénateurs n’ont pas souhaité unanimement retenir cette piste dans le cadre d’une Sécurité sociale écologique. « Nous sommes d’accord pour dire qu’il faut organiser une protection sociale des risques environnementaux et adapter notre fiscalité », a expliqué Mélanie Vogel lors de la présentation du rapport. « Mais sur les modèles choisis, tout n’est pas encore clair », a-t-elle ajouté. Un fonds pour l’environnement pourrait constituer une alternative.

Pour cette sénatrice écologiste, la sixième branche comporte pourtant des atouts au regard des défis à relever. Elle permettrait « d’unifier une grande partie des dépenses liées au changement climatique et à la transition écologique ». Elle serait également bénéfique face aux menaces qui pèsent sur la soutenabilité financière de la Sécurité sociale. Ainsi, cette sixième branche apporterait de la « visibilité et les marges de manœuvres nécessaires ».

Doublement du coût des catastrophes

Le rapport rappelle que « le coût des catastrophes naturelles devrait en effet doubler d’ici à 2040 ». « Le changement climatique et l’appauvrissement de la biodiversité provoqueront des chocs écologiques de forte amplitude sur notre économie et sur la société, prévient Mélanie Vogel. La pandémie actuelle de Covid-19 n’en est qu’une des premières manifestations. » Or, « notre système de protection sociale est ancré sur une économie qui a ignoré les limites planétaires », regrette la rapporteure. « Si nous ne faisons rien, nous ne serons pas en capacité de protéger les personnes », lance-t-elle.

« L’Etat apparaît, et c’est inquiétant, particulièrement démuni », déplore Mélanie Vogel. C’est le cas depuis l’abandon du suivi des cent indicateurs de la loi santé publique de 2004. Les plans de santé deviennent « des catalogues, non contraignants et non financés ». « Aucune stratégie d’adaptation de notre administration de la Sécurité sociale à la transition climatique, aucun plan de résilience et aucune planification publique de décarbonation de la santé n’ont été réalisés », fustige-t-elle.

 Stratégie publique de décarbonation

Les sénateurs préconisent donc de « guérir la Sécurité sociale de sa myopie ». Ils recommandent de « prendre en compte l’impact environnemental dès la conception des politiques publiques ». Il faudrait confier le pilotage interministériel des politiques environnementales à un Haut-commissaire à la planification de la transition environnementale.

Autres recommandations : diffuser le concept de « One health », c’est-à-dire « Une seule santé », qui prend en compte l’ensemble du vivant. L’économiste Eloi Laurent défend également cette idée. Le renforcement de la prévention est réclamé, notamment pour atténuer l’évolution des maladies chroniques, tout comme la réalisation d’études sur l’impact économique global de la prévention. Par ailleurs, la mission appelle à la conception d’une stratégie publique de décarbonation. Cette dernière doit impliquer aussi bien les acteurs privés que publics.

Enfin, tout un volet de propositions porte sur la mise en œuvre d’une Sécurité sociale alimentaire. Les sénateurs y évoquent « une concertation nationale pour élaborer de manière démocratique les fondements d’une allocation alimentaire durable ».